Introduction

Dans les années 80, le monde des comics a été marqué par une véritable révolution. Un nouveau venu insuffle enfin un renouveau au genre en dotant ses personnages d'une profondeur psychologique jusqu'alors absente de ce type de bande-dessinée. Il s'appelle Frank Miller.

Graphiquement, Miller est au comics actuel ce que furent Adams ou Wrightson quinze ans auparavant et ce que seront dix ans plus tard des garçons comme Lee et Mac Farlane : un électrochoc. On aime ou on déteste mais on ne peut rester indifférent. 

Miller fera ses premières armes avec Daredevil. A l'époque, Tête à corne est en perte de vitesse et c'est Frank qui va lui donner ses nouvelles lettres de noblesses en développant un nouvel univers noir et étouffant autour du personnage. Le Caïd, Elektra, le gladiateur et évidemment  le Tireur vont contribuer à faire de Daredevil une véritable institution chez Marvel.

Par la suite, Miller s'attaquera avec toujours autant de succès à d'autres personnages comme le Wolveryne mais c'est chez DC, avec Batman, qu'il signera son chef d'œuvre. Dans Darknight's return, l'auteur touche au pur génie. Peut être parce qu'il sait qu'il ne fera jamais mieux dans le monde du comics, il passe en 1992 à un nouveau genre : le roman noir.

Une fois de plus, il dépoussière un genre tombé en désuétude car Sin City n'est pas uniquement peuplé de petites pépées roulées comme des déesses et de flics en imper. C'est ça et bien plus encore. Une espèce de mélange entre l'Amérique de l'après guerre et un monde futuriste à la Blade Runner en pleine déliquescence. Un compromis contre-nature entre le visuel de Proyas et l'maginaire de Mc Bain.

Amusant de constater combien Sin City est proche de la rigoureuse et très spartiate construction tragique: unité de temps, de lieu et d'action. En effet, les protagonistes des différents tomes vont et viennent d'une histoire à l'autre, déstabilisant le lecteur. On ne meure pas dans Sin City, on disparaît, le temps nécessaire à la ville de régurgiter sa carcasse pour l'impliquer dans une nouvelle histoire sordide pleine de sang et de colère.

Pas de gentils et de méchants dans cette saga. Juste des acteurs qui vont jusqu'au bout de leurs fantasmes et de leur destin. Miller a  cet extraordinaire pouvoir de savoir raconter sans juger ni excuser. Ultra-violent, érotique, malsain, impitoyable, triste, drôle, envoûtant, Sin City, c'est tout ça. Et bien plus encore...